Ces erreurs à éviter vis-à-vis de nos enfants lorsqu’on est parent séparé
La vie d’un parent séparé est rarement simple, surtout quand tout le quotidien est à réorganiser et réinventer dans les mois qui suivent la séparation. Stress, fatigue, irritabilité et culpabilité… le cocktail est souvent explosif et nos réactions, pas toujours appropriées vis-à-vis de nos enfants. Même quand nous cherchons à les protéger.
1- Critiquer l’autre parent
“Dès que je rentrais chez ma mère, elle me posait des dizaines de questions sur le déroulement de ma semaine chez mon père. Un interrogatoire en règle qui aboutissait inévitablement à une salve de jugements et de critiques – il nous avait couchés trop tard, n’avait pas assez varié nos repas, etc…. C’était épouvantable pour moi. Je savais que mon père faisait au mieux. J’ai fini par ne plus vouloir répondre et me suis murée dans le silence chez ma mère. Je sais que cela a fait beaucoup de peine à ma mère qui n’a pas compris à l’époque mais c’était trop dur pour moi.” Comme Laura, qui avait 11 ans quand ses parents se sont séparés, beaucoup d’enfants ne supportent pas que l’on attaque leur parent.
Surtout, un parent qui est régulièrement critiqué finit par être discrédité aux yeux de son enfant, ce qui est excessivement perturbant pour lui. Yvonne Poncet-Bonissol et Stéphanie Assante l’expliquent ainsi dans leur livre “Vivre heureux en famille recomposée” : “Les propos acerbes fusent sous couvert du bien de l’enfant. Celui-ci est sans cesse partagé entre son amour son son parent et l’image d’incompétence et d’irresponsabilité que d’autres adultes renvoient de lui.”
Résultat ? L’enfant va se sentir obligé de tenir un rôle de composition, pour se comporter comme ce qu’il pense être attendu de lui, il va cloisonner de plus en plus sa vie entre chez son père et sa mère, ou va se détourner d’un dialogue fluide et naturel avec ses parents. Rien de bon, en somme.
2- Utiliser l’enfant pour régler ses comptes avec son ex
Autre tentation, parfois inconsciente chez certains parents séparés : faire de l’enfant le vecteur de messages destinés à marquer des points ou régler ses comptes avec son ex-conjoint. C’est parfois légitime quand il consiste à faire passer une info essentielle (même si elle peut déjà être pesante dans ce cas pour un jeune enfant), mais cela devient vite nuisible quand se cachent dans le message un reproche ou une attaque. Et ce, que l’enfant en ait conscience ou pas. En cas de désaccord, mieux vaut tenir l’enfant écarter des disputes et récriminations qui le dépassent et dont il a vite fait de se croire responsable.
3- Donner à l’enfant une place d’adulte
Souvent, notamment dans les mois qui suivent la séparation, il peut nous arriver de nous confier à notre enfant. Parce qu’il nous voit inquiet, stressé, triste… parce que sa présence nous réconforte. Parce qu’aussi, souvent, nous n’avons personne d’autre, personne “adulte” à qui confier nos peines.
Sauf qu’un enfant n’est jamais un bon interlocuteur pour assumer une mission d’adulte. Il n’a pas la maturité, le recul pour être notre ami ou notre confident. Et encore moins pour prendre sur ses épaules les responsabilités qui incombent normalement à l’autre parent.
Pourtant, les psys le disent : certains enfants finissent par être traités comme des “petits adultes”, on leur parle comme à des grands, et on leur en demande beaucoup trop pour leur âge. Surtout qu’un enfant, face à un parent triste ou en demande, aura toujours envie de l’aider, voire de le sauver. Ce qui le mettra dans une situation intenable pour lui. Ce phénomène a même un nom ; on parle de parentification de l’enfant et cela est très nuisible pour son bien-être et son développement, sans qu’il en ait conscience. Car lui pense bien faire ! C’est donc à nous, parents, de veiller à le laisser à sa place d’enfant et à nous tourner vers des adultes à même de nous aider et de nous écouter si nous en éprouvons le besoin.
4- Surprotéger son enfant pour “compenser”
D’autres parents auront, quant à eux, un réflexe un peu inverse : ils chercheront coûte que coûte à éviter à leur enfant toute difficulté ou toute déception. Parce qu’ils se sentent eux-mêmes inquiets ou du fait de leur culpabilité, ils s’évertueront à leur créer un “cocon” protecteur, à répondre à leur moindre besoin, à leur faire plaisir coûte que coûte… voire à faire tout à leur place pour leur éviter de devoir faire des efforts. “Vous savez, il est tout ce qu’il me reste” “avec tout ce qu’il a vécu avec la séparation, il mérite bien que je le chouchoute” peut-on les attendre dire pour expliquer l’attention démesurée qu’ils portent à leur enfant ou pour justifier le fait qu’ils ne laissent jamais leur enfant à une baby-sitter ou à un grand-parent, par exemple.
Le hic ? C’est que la surprotection nuit au développement de l’enfant qui va finir par se dire que le monde est très dangereux – si son parent le protège à ce point – ou qu’il n’est pas capable, de lui-même, d’y vivre (il ne va donc pas grandir en ayant confiance en lui). Un enfant, même s’il a mal vécu la séparation de ses parents, a besoin de se confronter à des difficultés pour apprendre, évoluer et vivre normalement, de manière autonome.
5- S’oublier complètement en tant que personne
Etre un parent séparé implique souvent de réapprendre à vivre seul. Si certains trouvent dans cette solitude un refuge après des mois difficiles, le risque est de se couper des autres, du monde extérieur et de leur énergie. Beaucoup de parents séparés expérimentent notamment le syndrome du nid vide quand leurs enfants parent chez leur ex-conjoint. Pour eux, la tentation est forte est de restez chez eux, pour cacher un chagrin que l’entourage n’est pas tout à fait capable de comprendre. Mais c’est ainsi, malheureusement, que peut s’installer le cercle vicieux du repli sur soi : le parent séparé voit de moins en moins de monde, s’isole de plus en plus, perd peu à peu ses amis pour finalement… Toute son attention va alors se reporter sur son ou ses enfants, dans l’attente de leur retour, de leur présence… Mais cette focalisation n’est pas bonne pour l’enfant qui va en ressentir le poids et qui va, bien souvent, partir chez son autre parent la mort dans l’âme s’il sent qu’il laisse son parent dans sa tristesse et sa solitude.
Une bonne raison de ne être se laisser tenter par ce repli sur soi : si vous n’avez pas la force de sortir et de vous ouvrir aux autres et au monde pour vous, faites-le pour vos enfants !
A lire : “Vivre heureux en famille recomposée” de Yvonne Poncet-Bonissol et Stéphanie Assante, Editions Dangles