Mes beaux-enfants me rejettent : que faire ?
Votre belle-fille vous critique sans cesse ou vous oppose un « t’es pas ma mère » systématique ? Vous sentez que votre beau-fils vous évite ou tout simplement fait comme si vous n’existiez pas ? En famille recomposée, les beaux-enfants mènent parfois la vie dure à ces beaux-parents qu’ils n’ont pas choisis, qu’ils préfèreraient bien souvent ne pas avoir sous leur toit ou dans leur vie… Comment réagir face aux petites piques et grosses tensions, mais aussi parfois à l’indifférence, tout aussi blessante ? Nous avons demandé à Estelle Jouquan, mère et belle-mère et surtout coach certifiée en famille recomposée, de nous donner ses conseils pour comprendre les réactions des enfants et vous aider à nouer une relation pacifiée.
« Le rejet de l’autre peut se comprendre. Il faut en comprendre les raisons et voir comment cela se manifeste chez l’enfant. Les réactions peuvent être différentes suivants les âges et le contexte. Que faire quand mes beaux-enfants me rejettent ?
Les enfants subissent un traumatisme lors d’une séparation. La séparation peut s’apparenter à un deuil. Ils doivent faire le deuil de la famille papa/maman. Les phases d’acceptation n’arrivent pas au même moment pour tout le monde. Si les parents ont réussi à se reconstruire avec quelqu’un d’autre, ce n’est pas forcément le cas pour les
enfants.
En psychologie, on parle de 5 étapes d’acceptation pour une séparation ou un deuil.
1- La phase de déni
2- La colère
3- Le marchandage
4- La dépression
5- L’acceptation
Le rejet de la nouvelle personne se situe à la phase 1 ou 2 du processus d’acceptation. Les enfants nient la séparation de leurs parents. Ils sont encore dans l’espoir qu’ils reviennent ensemble. Cette période peut prendre beaucoup de temps. C’est pourquoi ils peuvent montrer leur mécontentement et leur souffrance par la colère et le rejet. Des tensions familiales apparaissent rapidement car les adultes se sentent démunis.
En tant que beaux-parents vous voulez une bonne relation avec vos beaux enfants. Vous voulez que la vie familiale se passe au mieux sans conflits. Alors que faire en cas de rejet de vos beaux enfants ?
Estelle Jouquan, coach certifiée mais avant tout une femme qui a trouvé son équilibre de vie au sein de sa famille recomposée. Maman de 2 enfants et belle maman de 3. Elle a grandi avec des parents séparés depuis l’âge de 6 ans.
C’est donc tout naturellement qu’elle s’est spécialisée dans le coaching en famille recomposée. Par son expérience de vie, elle comprend les problématiques que les nouvelles configurations familiales peuvent poser aux enfants et celles rencontrées par les parents et beaux-parents.
Son conseil principal : Pour une famille recomposée heureuse, le temps est votre meilleur allié !
Communiquer (et bien communiquer !)
Il est préférable que ce soit le parent qui communique directement avec ses enfants. Il essayera de comprendre ce rejet.
Ce qu’il faut éviter :
– les questions directes et fermées. Exemple : « tu ne l’aimes pas ? » Toutes les questions dont les réponses peuvent être OUI ou NON, n’ouvrent pas au dialogue.
– les réflexions qui impliquent vos propres ressentis. Exemple : « Pourtant, elle est gentille avec toi ? » ou « Tu sais, il t’aime bien ? ». Votre enfant ne s’exprimera pas librement. Il sera orienté par votre jugement et aura le sentiment que vous ne le comprendrez pas s’il vous dit le contraire.
– refuser de le comprendre et lui dire qu’il a tort. Exemple : « Je ne comprends pas, on fait tout pour toi, tu pourrais être plus gentil ». Vous ne pouvez pas le blâmer pour ce qu’il ressent. Il va se retrouver bloquer par vos reproches et refusera de parler pensant que de toute façon il aura tort à vos yeux.
Ce qu’il faut favoriser :
– un moment propice à la communication. C’est une conversation qui nécessite du temps devant vous. L’enfant doit le sentir. Rien de plus frustrant que d’entamer une conversation entre le lancement d’une machine à laver et la fin de cuisson du gratin de lasagne !
– des questions ouvertes qui vont lui permettre de s’exprimer : « Comment te sens-tu en ce moment ? » « Pour quelles raisons as-tu réagi comme ça à table ? » « Y a-t-il des choses qui te tracassent en ce moment dont tu veux me parler ? »
– lui montrer que vous le comprenez. Je parle ici de comprendre et respecter ses sentiments (frustration, colère, agacement).
Fixer ses limites (et en parler !)
Il y a une différence entre respecter les ressentis d’un bel-enfant et accepter son manque de respect. Ce sont deux choses différentes. Si vous devez accepter le premier, il faudra lui faire comprendre aussi s’il a dépassé les limites du respect. Cette limite à ne pas franchir est très aléatoire selon les individus. Nous avons tous une éducation, une façon de voir les choses et souvent nous ne mettons pas les limites au même endroit que notre partenaire ou nos beaux enfants. C’est là encore une question de communication. L’erreur est de penser que l’autre connait vos limites et s’arrêtera de lui-même.
C’est à vous de poser vos limites en le disant formellement. Prenons l’exemple où les enfants critiquent systématiquement la cuisine de leur belle maman. Ils partent du principe qu’ils ont le droit de ne pas aimer et de le dire. A répétition cette belle-maman qui essaye toujours de bien faire, prend ses remarques pour elle et pense que les enfants veulent la blesser. C’est son interprétation. Elle peut avoir raison comme elle peut avoir tort. Elle pourra expliquer aux enfants qu’elle essaye de faire de son mieux. Elle peut tourner la situation d’un ton humoristique et dire qu’elle pensait être une bonne cuisinière. Elle peut leur demander comment ils auraient fait les choses car elle est preneuse de bons conseils surtout par des experts culinaires 🙂 Et surtout elle peut dire à ce moment-là ce qu’elle ressent vraiment. Il n’y a pas de honte à dire à ses beaux-enfants que leurs remarques sont vexantes et blessantes. Là, ils comprendront les limites. C’est également à l’autre parent d’intervenir si la situation se reproduit par la suite. Le partenaire comprendra aussi que ses enfants ont franchi vos limites.
Se remettre en cause en tant que beau-parent
Il y a des enfants avec lesquels les relations sont difficiles, avec lesquels il y a beaucoup d’incompréhension. Mais au fond, avec beaucoup d’amour, de respect et de temps cela passera. Il y a 5 phases dans le processus d’acceptation. Si l’enfant est à la première ou à la deuxième cela veut dire qu’il est sur la bonne voie. La phase 5 de l’acceptation arrivera tôt ou tard.
Avec certains enfants, les relations seront plus compliquées. Posez-vous vraiment la question : Pourquoi mes beaux-enfants me rejettent ? Il est difficile d’accepter votre part de responsabilité. En séance de coaching, les personnes
viennent parfois à comprendre les raisons du mal-être, comme par exemple :
- Vous pouvez être la raison de la séparation des parents de l’enfant et votre union ne sera donc pas légitime à ses yeux.
- Trop heureux/se d’avoir retrouvé l’amour, vous avez précipité les présentations alors que les enfants n’étaient pas prêts.
- Le parent n’a pas vraiment pris le temps de se remettre de la séparation. Il n’a pas pris le temps de récréer une unité familiale avec ses enfants. (Vous trouverez des infos sur la pyramide de la reconstruction après une séparation sur mon site)
- Vous voulez trop bien faire. Inconsciemment vous forcez la relation avec vos beaux-enfants pour qu’ils vous apprécient.
- Vous cherchez à remplacer ou prendre la place du père ou la mère de l’enfant car vous pensez mieux faire (ou en cas de deuil l’enfant n’a plus le deuxième parent)
Se remettre en cause en cas de rejet des beaux-enfants est efficace. Cela vous permettra de rectifier le tir avec les enfants. De vous repositionner correctement dans cette relation. Il faut rester soi-même, sans trop en faire. Il faut comprendre l’enfant et le placer au cœur de cette nouvelle relation.
Acceptez le rejet n’est pas un signe de faiblesse ou d’abandon, c’est plutôt un signe de sagesse et de grande capacité d’adaptation. Il y a des situations plus compliquées notamment avec les adolescents (Vive les hormones au passage !). Il faudra de temps en temps reculer de 10 pas pour en refaire 2 de mieux. On le fait même avec nos propres enfants. Dites-vous que les semaines se suivent mais ne se ressemblent pas. Vous aurez tantôt des sourires, tantôt des grimaces. Acceptez le rejet c’est aussi leur montrer que vous respectez leur souhait. Il faudra vous armer de patience. Vous avez le recul et la maturité pour le faire et en plus vous pouvez compter sur votre moitié.
Passer à un plan d’action à deux
Tout.e seul.e vous allez plus vite, mais à deux, vous irez plus loin ! Votre conjoint connait ses enfants. Il aura pris du temps avec eux pour comprendre. Vous aurez fait votre travail d’introspection et de remise en cause. Nul doute que
vous aurez toutes les clefs pour favoriser l’acceptation de vos beaux enfants.
La relation la plus fragile dans une nouvelle sphère familiale est finalement le couple. La relation entre les parents et les enfants est solide et plus ancienne que ce nouvel amour.
Cultivez alors cet amour. Avec de la communication et du soutien, mettez-vous d’accord sur plusieurs points :
– Évoquez ensemble la parentalité. La position que vous aimeriez avoir avec vos beaux-enfants. Ce que votre conjoint souhaite également.
– Favoriser des instants beaux-parents/enfants seuls. Le beau-parent ne peut trouver sa place que si le parent lui en laisse un peu. L’enfant abordera certainement un autre comportement que si le parent est tout le temps présent. Il faut donc aménager des temps ensemble.
– Si ce sont les instants ensemble qui sont finalement le problème ? Aménagez des moments où le parent retrouvera du temps avec ses enfants et le beau parent devra prendre du temps seul.
– Montrez aux enfants qu’ils font partie de vos projets. Donnez-leur la possibilité de donner leurs avis : Est-ce que ça te dit que je t’emmène au sport le lundi ? Que diriez-vous d’un pique-nique samedi midi ? Nous avons envie de changer de canapé et nous hésitons entre 2 modèles, lequel préférez-vous ?
Permettre à l’enfant de s’exprimer ne veut pas dire que c’est lui qui aura la décision finale et décidera de tout. Cela lui montrera que son avis compte et que vous ne décidez pas de tout uniquement en couple.
Vous l’aurez compris : se faire accepter de l’enfant n’est pas chose facile. C’est un vrai travail d’équilibriste. Comme je le dis souvent dans mes différents coachings, le temps est votre meilleur allié. Il ne faut pas précipiter l’acceptation de l’enfant. Si votre tribu compte plusieurs enfants, vous verrez que les relations seront différentes d’un enfant à l’autre. Suivant leur caractère, leur âge et leurs envies vous développerez des choses différentes
avec chacun. Il faudra être patient et tisser une toile qui vous relie tous petit à petit. Ce sera votre toile du bonheur. »
Pour aller plus loin
Un grand merci à la coach pour famille recomposée Estelle Jouquan, Plus d’infos sur son site Jedeveloppement