Beaux-parents et autorité en famille recomposée : attention, fragile !
« T’es pas mon père ! », « Je vois pas pourquoi je t’obéirais ! », « Maman dit que je n’ai pas à t’écouter… »
Derrière les phrases parfois assassines des enfants se cache une réalité simple mais douloureuse : l’autorité en famille recomposée, c’est tout sauf naturel, intuitif, évident. Alors comment se faire accepter et respecter en tant que beau-parent ? Décryptage et conseils.
Beau-parent : une autorité qui ne se décrète pas
« Pourquoi devrais-je obéir à cet inconnu ? » Cette question résonne souvent dans la tête des enfants face à un beau-parent qui débarque parfois soudainement dans leur vie. La réponse, bien qu’évidente pour les adultes, ne convainc pas toujours les plus jeunes. Car l’autorité d’un beau-parent ne s’impose pas : elle se construit. Avec du temps, de la patience et, surtout, un lien sincère.
Les premiers mois sont cruciaux. Le premier piège : évitez d’imposer votre autorité d’entrée de jeu, trop tôt, de façon trop rigide. Se mêler des règles qui avaient cours avec leur parent risque de braquer les enfants (et parfois même votre conjoint.e). Au début, préférez les moments ludiques : des jeux, des sorties, tout ce qui peut créer de la complicité, plus que de la contrainte. Ne cherchez pas pour autant à « acheter » l’affection des enfants avec des cadeaux ou des gestes exagérés. Montrez-vous au contraire présent, sincère, soucieux d’eux. C’est ainsi que se construira une relation de confiance et qu’ils vous accepteront plus volontiers dans leur vie, avec un rôle d’adulte référent.
Attention ! « Ni copain, ni parent » : c’est là toute la subtilité ! Car le beau-parent ne peut être cantonné qu’aux bons moments et au fun, mais il ne peut pas être non plus un « substitut » au parent, qui garde un rôle crucial notamment pour faire respecter le cadre.
Le rôle clé du parent biologique
Pour que le beau-parent trouve sa place dans la nouvelle structure familiale, le parent joue un rôle pivot fondamental. Sa première mission ? Légitimer le nouveau conjoint aux yeux des enfants et idéalement soutenir et valoriser ses prises d’initiative ou ses décisions. Cela implique de poser un cadre clair et de l’expliquer aux enfants, dès le début de la cohabitation, et avant que toute contestation ne s’installe. Plus tard, c’est souvent trop tard.
Une fois cette reconnaissance établie, le parent doit aussi savoir prendre du recul. Laisser l’autre adulte agir, expérimenter, parfois échouer. Ce n’est pas chose facile. Beaucoup de parents ressentent une culpabilité à introduire un nouvel adulte dans la vie de leurs enfants, surtout après une séparation douloureuse. Cette culpabilité fait qu’ils ont souvent du mal à lâcher prise et à accepter que l’autre adulte prenne le relai ou prenne une place auprès de l’enfant. Pourtant, une fois expliquer qu’il n’y a pas de concurrence entre l’autre parent et le beau-parent, mieux vaut laisser faire : accorder de l’autonomie au beau-parent est indispensable pour le laisser trouver une place auprès de l’enfant. SA place.
Bien sûr, cet apprentissage peut s’avérer complexe. Le beau-parent, surtout s’il n’a pas d’enfant lui-même et donc pas d’expérience préalable de la parentalité, doit trouver ses marques avec des enfants parfois déjà grands, souvent déjà éduqués selon d’autres règles ou valeurs que les siennes. Un gros, gros challenge… Et un véritable parcours du combattant, où le parent biologique doit accepter de ne pas tout maîtriser tout en soutenant son ou sa partenaire. Pour lui aussi, c’est un défi ! Libre à vous de lui faire lire cet article, si vous le trouvez trop en retrait :).
S’accorder sur le cadre au sein du couple
Avant même d’introduire le beau-parent dans la vie des enfants, il est essentiel que les deux adultes définissent ensemble le rôle attendu. Quelle sera l’implication du beau-parent dans les soins quotidiens ? Aura-t-il le droit de recadrer ou sanctionner l’enfant ? Ces questions doivent être abordées honnêtement.
Dans la pratique, cette conversation est souvent écartée, noyée par le quotidien. Pourtant, elle est cruciale. Un désaccord sur les rôles peut rapidement mener à des tensions, voire à saper les efforts du beau-parent. Des interventions contradictoires devant les enfants, par exemple, risquent de diminuer la crédibilité du beau-parent.
Divergences éducatives : un terrain hautement miné
Les différences dans les approches éducatives sont fréquentes dans les familles recomposées. Lorsque le beau-parent n’a pas d’enfants, sa vision de l’éducation ou ses principes peuvent être niés sous prétexte… qu’il n’a pas d’enfant. Qu’il ne sait pas. C’est rarement 100% juste mais c’est toujours violent ! Accorder ses violons dans le couple en s’écoutant – vraiment – mutuellement est absolument nécessaire.
Dans les configurations où chaque adulte a ses propres enfants, les désaccords peuvent également être vifs. Il est alors crucial de définir des règles communes à la maison. Les sujets sensibles, comme le temps d’écran, la politesse ou l’alimentation, doivent être discutés en amont. Que chacun soit au clair sur ce qui est non négociable pour lui et pour l’autre. Et corollaire parfois plus dur, qu’il soit prêt à lâcher sur ce qui est moins important, histoire de trouver un terrain d’entente et un modus vivandi… vivable !
L’ombre de l’ex-conjoint
Enfin, une dernière variable complique souvent la situation : l’ex-conjoint. Comment accepter qu’un inconnu partage la vie de son enfant ? Voire noue une relation affective avec lui ? La peur de perdre sa place peut entraîner de grosses complications de la part du parent biologique. Un des plus courants (et dévastateurs pour les enfants comme pour la famille recomposée) : il va discréditer le beau-parent ou encourager l’enfant à rejeter son autorité.
Cela place l’enfant au coeur d’un conflit de loyauté épouvantable, créant des tensions qui, si elles ne sont pas apaisées, risquent de dégrader irrémédiablement la relation entre l’enfant et le beau-parent. Mais aussi entre l’enfant et ses parents, selon le parti qu’il se sent obligé de prendre.
Face à ces situations, faire appel à un médiateur familial peut grandement aider. Cet intervenant neutre permet de désamorcer les conflits, de clarifier les attentes et de poser un cadre où chaque protagoniste trouve sa place.
Comment saper d’emblée son autorité de nouveau beau-parent ?
Il existe 1001 manière de rater sa famille recomposée. La première est de croire que le statut de beau-parent nous autorise à débarquer en terrain conquis dans la vie d’un adulte et de ses enfants. Parmi les faux-pas des débuts à éviter absolument, on notera :
- Vouloir imposer ses propres règles de manière trop rapide et trop rigide, sans prendre le temps de nouer un lien avec l’enfant et sans prendre en compte le fonctionnement qu’il avait, avant, avec son parent
- Ne pas tenir compte du fait que l’enfant « perd » souvent une relation assez exclusive avec son parent quand celui-ci refait sa vie. « Bonus Mom » ou « Bonus Dad », ça marche surtout sur le papier, car il y a de fortes chances que l’enfant vous voit plus comme un intrus pénible que comme un cadeau.
- Rester passif ou se reposer uniquement sur l’autorité du parent… Si c’est à lui que revient toujours le sale boulot, y compris le recadrage et le respect des règles, il y a de fortes chances que celui-ci se sente très seul et que l’enfant vous sente « en marge » de sa vie. Et non pas comme un adulte référent. Il peut aussi prendre ça pour de l’indifférence, anéantissant tout effort de votre part de créer une chouette relation entre vous.